Live News

Trafic de drogue dans les prisons : les maillons faibles du système

La connivence entre certains officiers des prisons et des détenus a été révélée au grand jour lors des travaux de la commission d’enquête sur la drogue présidée par l’ancien juge Paul Lam Shang Leen. à ce jour, neuf officiers des prisons, incluant deux hauts gradés, ont été interrogés par rapport à leurs relevés bancaires et à leur proximité avec des détenus. Ils sont soupçonnés d’être des maillons d’un réseau opérant depuis la prison. Enquête.

Publicité

« La connivence entre certains gardiens de prison et des détenus existe dans tous les centres pénitentiaires du monde », avance un surintendant des prisons. Il lève le voile sur cette entente secrète entre des détenus et certains gardiens, et explique comment ces derniers se laissent prendre au jeu.

« Les détenus à Maurice agissent comme ‘jockeys’ pour des barons de la drogue. Ils ont pour mission d’enrôler des gardiens de prison. Ceux-ci peuvent appartenir  à n’importe quelle unité de la prison, par exemple, celle de la Prison Security Squad (PSS) ou encore celle des General Duties. C’est ainsi que le « jockey » entame la conversation avec les gardes-chiourmes, histoire de leur tirer les vers du nez et pour, par la suite, connaître leurs faiblesses », indique notre source.

Ces faiblesses serviront par la suite à faire pression sur l’officier pour qu’il devienne passeur. Selon le haut gradé, les officiers qui tombent dans le panneau sont d’abord soumis à un test. Pour ce « coup d’essai », ils doivent introduire des cellulaires et d’autres équipements électroniques à la prison. Cette opération peut leur rapporter Rs 15 000 au moins, dépendant du type de cellulaire. Les officiers-passeurs feraient preuve d’un trésor d’imagination pour dissimuler les produits prohibés afin d’éviter d’être inquiétés lors des fouilles. Si certains utilisent leurs parties intimes, d’autres introduisent les colis dans la semelle de leurs chaussures.

Une dizaine d’officiers dans le collimateur

Une dizaine de gardiens seraient dans le collimateur des services de renseignements de la prison. Ces officiers et hauts gradés, soupçonnés d’être de connivence avec les détenus dans le trafic de produits illicites à la prison, opéreraient à la Prison centrale et à l’Eastern High Security Prison, de Melrose.

Selon le surintendant des prisons, ce n’est qu’au bout de plusieurs coups à succès que l’officier « arrive à gagner la confiance des barons ». Il se verra ensuite confier des tâches « importantes », comme celle d’introduire des substances illicites.  « L’officier-passeur peut toucher jusqu’à Rs 40 000 pour un seul colis !  » laisse entendre le haut gradé.

Le gardien de prison devient ainsi un maillon important du trafic de drogue en milieu carcéral.  « La nouvelle se répandra dans toute la prison. L’officier peut se faire approcher par les ‘jockeys’ travaillant pour d’autres barons. Il sera régulièrement sollicité pour ses services contre un pactole », ajoutent d’autres officiers affectés à la Prison centrale.

Des fouilles qui laissent à désirer

Un élément de la Prison Security Squad (PSS) de l’Eastern High Security Prison de Melrose soutient que les substances illicites généralement introduites à la prison sont le gandia et la drogue synthétique. Notre interlocuteur dénonce, dans la même foulée, le manque de rigueur lors des fouilles effectuées dans les centres pénitentiaires. Dans la majorité des prisons, dit-il, « les gradés ne sont pas correctement fouillés ». Sans doute, poursuit-il, parce que c’est un officier d’un rang inférieur qui est responsable de cet exercice. 

« Tout le monde devrait être sujet à une fouille au moment de mettre les pieds dans l’enceinte de la prison. Les officiers le sont par leurs pairs. Tandis que, selon les Standing Orders de la prison, les gradés doivent être contrôlés par ceux du même rang. Tel n’est pas le cas depuis quelques années en raison du manque de gradés à la prison. Ce sont des officiers de la Prison Security Squad qui ont pour tâche de mener les fouilles sur leurs supérieurs. C’est ainsi que l’élément de la PSS hésitera à procéder à une fouille réglementaire sur son supérieur », explique notre source.

En cas de soupçons, il souligne que des strip searches sont menées. L’exercice exige que le garde-chiourme ôte son uniforme et ses sous-vêtements,  afin de procéder à une fouille corporelle.

La prison réagit

Les autorités carcérales se montrent intransigeantes sur la connivence existant entre officiers et détenus. D’ailleurs, le commissaire des prisons, Vinod Appadoo, sollicité au téléphone par Le Dimanche/L’Hebdo, déclare que les services pénitentiaires mettent tout en œuvre en vue de cibler et de traquer les brebis galeuses de l’institution. Avec l’expérience acquise dans la force policière, il dit entretenir de « bonnes relations avec les éléments de l’Adsu, de la Field Intelligence Unit de la police et de la commission anti corruption (Icac)… »

Le commissaire des prisons  trouve désolant le fait que « des officiers des prisons, qui ont jadis prêté serment d’allégeance à l’uniforme et à la profession, se font ainsi exploiter par des détenus ». « De fortes sommes d’argent sont en jeu et il s’avère difficile pour eux de résister. C’est pour cela que l’administration pénitentiaire préconise une rotation régulière des officiers. D’ailleurs, certains d’entre eux ont exprimé le souhait de changer d’affectation, afin de ne pas être trop longtemps en contact avec certains détenus », déclare le commissaire des prisons.

Commentant la convocation des neuf officiers des prisons à la commission d’enquête sur la drogue, Vinod Appadoo dira qu’il est « ravi de la tournure des événements et que cela serve d’exemple ».


Les dispositifs de recherche

Le commissaire des prisons explique que les autorités carcérales ont mis en place différents moyens de détection et d’autres dispositifs de sécurité afin de déjouer l’introduction de tout objet illicite. Il y a, d’abord, les Bosch chairs, ces chaises dotées d’un mécanisme pouvant repérer la présence d’objets en métal, et autres produits, dans les orifices. Puis, poursuit-il, il y a les fouilles corporelles, auxquelles sont soumis tous les officiers des prisons. « Outre ces deux dispositifs, la prison est également dotée d’une vingtaine de chiens renifleurs entraînés au repérage de substances illicites, ainsi que d’appareils électroniques. En dernier lieu, il y a les informations fournies par les services de renseignements de la prison. Ces informations peuvent provenir des officiers des prisons ou des détenus », précise Vinod Appadoo.


Les dispositifs de recherche

Le commissaire des prisons explique que les autorités carcérales ont mis en place différents moyens de détection et d’autres dispositifs de sécurité afin de déjouer l’introduction de tout objet illicite. Il y a, d’abord, les Bosch chairs, ces chaises dotées d’un mécanisme pouvant repérer la présence d’objets en métal, et autres produits, dans les orifices. Puis, poursuit-il, il y a les fouilles corporelles, auxquelles sont soumis tous les officiers des prisons. « Outre ces deux dispositifs, la prison est également dotée d’une vingtaine de chiens renifleurs entraînés au repérage de substances illicites, ainsi que d’appareils électroniques. En dernier lieu, il y a les informations fournies par les services de renseignements de la prison. Ces informations peuvent provenir des officiers des prisons ou des détenus », précise Vinod Appadoo.


Les cas rapportés

Plusieurs cas de connivence entre officiers et détenus ont été rapportés à la police. En octobre 2015, un gardien de prison de Grande-Rivière-Nord-Ouest a été pris en flagrant délit alors qu’il tentait de remettre de la drogue à un détenu. La substance était dissimulée dans ses chaussettes. C’est en les retirant qu’il s’est fait prendre par ses collègues. Il faisait déjà l’objet d’une surveillance par l’unité 24/7 de la prison. En 2013, les effets d’un officier de la Prison Security Squad (PSS) ont été soumis à une fouille. De la drogue a été retrouvée dans sa nourriture, du briani. Ce cas avait fait grand bruit.

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !