Interview

Jack Bizlall: «2015 est une année de grandes inquiétudes»

Le syndicaliste et observateur politique revient sur quelques faits marquants de cette année 2015 qui tire à sa fin. Quel est le sentiment de Jack Bizlall sur les événements qui ont marqué cette année ? Il y a eu du positif, mais il se dit toutefois inquiet. Il s’explique…

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Comment résumeriez cette année 2015 ? C’est une année qui nous a sauvés des pires dérives du régime Ramgoolam. Sur ce plan, cela a été une année positive. Mais ne sommes-nous pas tombés dans une situation de régime oligarchique avec la famille Jugnauth? C’est la question qui se pose. Au final, 2015 est une année de grandes inquiétudes. Nous avons vu, en 2015, une grande « opération nettoyage ». Est-ce bénéfique pour le pays, selon –vous ? Avec un valse de passage de personnalités aux Casernes centrales : Navin Ramgoolam, Anil Bachoo ou encore Shakeel Mohamed. Lorsque son mandat (ndlr : de Président de la République) était arrivé à terme, SAJ avait décidé de rester en poste. Puis, le MSM a construit une alliance avec le PTr en 2010. Donc, à mon point de vue, SAJ a, à un moment, cautionné l’action de Ramgoolam et c’est grave. Il était bien au courant de ce que Ramgoolam avait fait. Puis, avant les élections, SAJ a voulu à tout prix avoir la peau de Ramgoolam. Et c’est louche. Les Jugnauth veulent à tout prix éliminer le PTr, ce qui fera que le MSM demeurera le seul parti à gérer le pouvoir. D’ailleurs, vous verrez qu’il s’attaquera plus tard au MMM. SAJ a une perspective très claire dans la tête. L’attaque frontale subie par Ramgoolam est une action qui ne vise pas à assainir le pays. Le seul but est de finir Ramgoolam et le PTr dans la foulée. Le MSM veut finir le PTr et Ramgoolam. Pensez-vous que les récentes révélations de Nandanee Soornack sur la paternité de son enfant puissent nuire à l’ex-PM ? Tout le monde sait qui est le père de la fille de Soornack. Je pense qu’avant tout, il faut protéger un enfant. Il ne faut pas marcher sur les gens et surtout pas un enfant. De toute façon, je pense que Ramgoolam est aujourd’hui cuit. Il tentera de se défendre. Il viendra dire que l’argent retrouvé chez lui appartient au PTr. Il va dire que s’il y a eu des donations au PTr, cela a aussi été le cas pour les autres partis. Il y a maintenant la loi sur la bonne gouvernance et qui permet de saisir des biens, dont la provenance est inexpliquée… Justement, Navin Ramgoolam pourra contester une tentative de saisie en venant dire qu’il n’y a pas eu de poursuites au pénal. Cela risque de durer des années. Dawood Rawat risque d’utiliser le même procédé. Vous pensez alors que cette loi vise les Ramgoolam, Rawat, etc… Je l’ai déjà dit. On ne peut amender la Constitution pour s’attaquer à un individu et à un groupe. En République, cela ne se fait pas. C’est  grave ce qui a été fait. Avec cette loi de Bhadain, il y aura des changements dans la nature même de l’État. Sur un point plus économique, le gouvernement veut créer une synergie avec le secteur privé. Est-ce une politique valable, selon-vous ? Le secteur privé se pose pas mal de questions en ce moment, notamment sur Vishnu Lutchmeenaraidoo. Le ministre des Finances veut transformer Maurice en un nouveau Singapour. Néanmoins, Singapour se trouve dans un centre économique important. Il utilise les ressources humaines de la région. Maurice, au contraire, est loin de toutes ces zones économiques. Nous sommes, en sus, en concurrence avec un pays dont la classe politique ne nous aime pas : l’Afrique du Sud. On a beaucoup parlé de gouvernement… mais si vous deviez aussi faire un bilan de l’opposition à ce stade. Que l’on me comprenne : j’ai une position objective en effaçant toutes les considérations personnelles. Je pense que nous avons eu une opposition performante, que ce soit parlementaire et extra-parlementaire. À ce niveau, nous sommes en avance sur la presque totalité des pays dans le monde. Nous avons une opposition très performante. Et nous avons un électorat qui ne se soumet pas volontairement au pouvoir. Nous n’avons pas un parti politique qui lui permet de rester pendant des années au pouvoir. Prenant tout cela en considération, 2015 a été une année d’opposition éclairée et performante, d’alternative et d’alternance.

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