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Drogues synthétiques: enseignants et recteurs se disent impuissants

Les drogues synthétiques sont bel et bien présentes dans les collèges. Ce que nous confirment enseignants et recteurs. Que ce soit dans les établissements secondaires privés ou publics, la consommation de ces substances par les élèves s’avère un réel problème. Shivram Sobha, enseignant dans un collège d’État et membre de la Government Secondary School Teachers Union (GSSTU), affirme que les chiffres ne reflètent pas la réalité. « Il y a beaucoup plus de cas qui ne sont malheureusement pas rapportés. Il faut être dans les collèges pour savoir ce qui s’y passe. La situation est alarmante, particulièrement dans les régions urbaines. Les élèves n’ont pas seulement accès aux drogues synthétiques. Certains d’entre eux les fabriquent eux-mêmes et les mettent en circulation. Tous les collèges sont concernés, même les plus réputés », insiste-t-il. Il souligne également que les enseignants n’ont pas les outils et les compétences nécessaires pour faire face à ce fléau. Dépassés, ils finissent par adopter, malgré eux, une attitude de laisser-aller. « La prise en charge des drogues de synthèse ne figure pas dans notre Scheme of Duty. Nous n’avons pas été formés pour assumer une telle responsabilité. Certains enseignants ont été menacés par des dealers. Nous craignons pour notre sécurité », dit-il. C’est la même inquiétude que ressentent les enseignants des collèges privés. Roshan Bookhun, membre exécutif de l’Union of Private Secondary Education Employees (UPSEE), évoque un  manque de formation. « Nous faisons de notre mieux pour combattre ce fléau. Mais nos ressources sont limitées. Nous nous retrouvons parfois  devant des élèves que nous soupçonnons avoir consommé des substances illicites, mais vu que nous n’en avons pas la certitude, nous ne pouvons rien faire. » Il ajoute que le laxisme des autorités est à déplorer. Selon lui, elles n’arrivent pas à trouver des mesures efficaces. « Un temps précieux est perdu à argumenter. Il faut d’abord commencer par la formation des enseignants. Il faut aussi entreprendre une étude pour connaître l’ampleur exacte de la situation pour enfin trouver une solution appropriée », propose-t-il.

« Troubles du comportement »

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"23378","attributes":{"class":"media-image aligncenter size-full wp-image-37256","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"1280","height":"720","alt":"Drogues synth\u00e9tiques"}}]] Yugesh Panday, assistant secrétaire de la Rectors and Deputy Rectors Association (RDRA), précise que les cas de drogue sont immédiatement rapportés aux autorités concernées. Son souhait : que la direction puisse avoir plus de flexibilité en ce qui concerne la prise de décision dans de telles situations. « Nous sommes conscients de la gravité de la situation. À l’heure actuelle, nous ne pouvons pas procéder à des fouilles si nous avons des doutes. Avec la National Behaviour Policy, on a tendance à se renvoyer la balle. Ce n’est pas évident de laisser les recteurs et les assistants recteurs gérer seuls la situation. » Il est d’avis qu’il faut des sanctions plus sévères, car la majorité de ces élèves ont déjà un dossier à l’école. Yugesh Panday estime qu’il faut travailler en collaboration avec la Police Training School pour lui référer de tels cas. « Ce sont des enfants avec des troubles du comportement extrêmement graves. Ces enfants doivent être transférés à la Police Training School avant de réintégrer le milieu scolaire. De plus, il faudrait qu’il y ait au moins deux Ushers dans un collège et ce n’est plus possible de travailler avec un personnel réduit », affirme-t-il. Rajah Pillay, recteur du collège Medco Cassis, indique qu’il a déjà mis en place un système de contrôle au collège pour contrer ce problème. En effet, il y a trois ans, un atelier de travail avec le personnel enseignant et non enseignant avait été organisé. Le recteur souligne que les différentes parties concernées – dont la Brigade des mineurs et les officiers du ministère de l’éducation – y étaient présents. « Les enseignants et le personnel non enseignant parcourent l’établissement pendant les breaks et la recréation. La coopération du personnel a grandement aidé à contrôler la situation. Les enfants sont conscients qu’ils sont surveillés et cela est un facteur qui les décourage à consommer de la drogue », estime-t-il.  
 

Leela Devi Dookun-Luchoomun: « La recherche est l’élément clé dans la lutte antidrogue »

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"23383","attributes":{"class":"media-image alignright size-full wp-image-37257","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"400","height":"480","alt":"Leela Devi Dookun-Luchoomun"}}]]Le fléau de la drogue synthétique est pris au sérieux par le ministère de l’Éducation. C’est ce qu’affirme la ministre Leela Devi Dookun-Luchoomun. Elle explique que les campagnes de sensibilisation ont été intensifiées dans le but d’informer les jeunes des dangers que représentent ces substances. « La jeunesse est notre avenir. Nous devons agir dès maintenant et trouver des mesures pour que les jeunes n’aient pas accès aux drogues. Ce n’est pas ce que nous voulons pour eux », affirme la ministre de l’Éducation. Elle fait aussi mention des projets de recherche qui seront entamés.  Ceux-ci auront pour but de rassembler un maximum d’informations sur les drogues synthétiques. « La recherche est l’élément clé qui nous permettra de lutter contre la prolifération des drogues. Il est aussi important de connaître les effets de ces substances. » Leela Devi Dookun-Luchoomun souligne que son ministère invite tous ceux qui souhaitent collaborer aux projets de recherche à se manifester. [row custom_class=""][/row]  
 

Qu’en pensent les parents ?

Maya, mère d’un élève de Form IV dans un collège d’état, confie que la situation concernant les drogues synthétiques dans les collèges est préoccupante. Pour elle, le milieu scolaire doit être synonyme de sécurité. « Je suis inquiète quand j’entends que des élèves consomment de la drogue dans les collèges. La pression des pairs va forcément détériorer la situation. Je surveille mon fils constamment, car je ne veux pas qu’il commence à se droguer. J’estime qu’il est temps que les autorités renforcent les lois. L’installation de caméras de surveillance et des fouilles doivent être considérées », préconise-t-elle.

Imran Dhannoo, président du centre Idrice-Goomany et travailleur social engagé dans la lutte contre la drogue depuis une décennie, explique que les drogues de synthèse sont des substances psychotropes synthétisées artificiellement. Elles imitent l’effet de drogues telles que le cannabis, l’héroïne, la cocaïne et le LSD. Il y a six familles de drogues synthétiques : cannabinoïde, cathinone, kétamine, pipérazine, phenethylamine et à base de plante.

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Steve, père d’une élève en Form V dans un collège privé, dit être moins inquiet. Il soutient que la discipline dans le privé est un moyen de dissuasion. « Il y a plus de contrôle et les actions prises par l’établissement dans de tels cas découragent le trafic ainsi que la consommation de drogue au collège. » Cependant, il souligne que les autorités devront prendre cette situation en main le plus rapidement possible pour éviter qu’elle ne se détériore. « Nous ne pouvons pas nous reposer sur nos lauriers. L’avenir de nos jeunes est en jeu. Ils sont vulnérables aux fléaux de la société », conclut-il. [row custom_class=""][/row]  
 

Véritable fléau: plusieurs morts depuis le début de l’année

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"23385","attributes":{"class":"media-image size-full wp-image-37258","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"1280","height":"720","alt":"Parvez Coya"}}]] Parvez Coya

[row custom_class=""][/row] La drogue dévaste tout sur son passage. Il n’y a pas que les jeunes qui sont touchés par la drogue de synthèse. Celle-ci a fait quatre morts récemment. Alenxandre Cotte, 21 ans, Bryan Juste, 19 ans, et également Ahmad Kaleem Razack Bacsou, 21 ans, Parvez Coya, 43 ans, sont morts après avoir pris de la drogue synthétique. Le chef religieux Meeajee Reshad Ibrahim Coya, 67 ans, est père de quatre garçons. Son fils aîné est décédé d’une overdose, le 8 mai dernier. Selon ses proches, avant de sombrer dans l’enfer de la drogue synthétique, Parvez Coya n’avait pas de mauvaises fréquentations. Il ne buvait pas et ne fumait pas. Il montrait un vif intérêt pour la spiritualité et participait à plusieurs programmes. Il enseignait au madrassa à temps partiel. Ancien élève du Saint-Mary’s College, il travaillait comme Assistant Manager au sein d’une firme privée. Mais durant les trois dernières années, le père a vu la vie de son fils basculer. Le jeune homme a commencé à prendre de la drogue de synthèse, à l’insu de ses proches. Il a été hospitalisé à deux reprises. « La troisième fois a été fatale pour lui. Mon fils était quelqu’un de bien, jusqu’à ce qu’il prenne de la drogue. Son décès laisse un vide dans ma vie », confie le père. À cause de la drogue, son fils a développé des problèmes cardiaques. « Li ti enn garson tou letan an bonn sante, me depi li pran sa ladrog la, li gagn problem leker », ajoute-t-il. Ce père de famille ne souhaite à aucune famille le calvaire de voir un des siens sombrer dans l’enfer de la drogue. « Selon moi, cette nouvelle drogue de synthèse est très dangereuse et nul n’est a l’abri. Je demande aux parents d’être vigilants et d’aider leur enfants à s’en sortir. Li fasil rant ladan me li byen difisil pou sorti. » [row custom_class=""][/row]
Alexandre Brian Cotte, 21 ans, est décédé à l’hôpital Jeetoo, le 26 mars. Cet habitant de Vacoas avait pris de la drogue de synthèse et il est resté plusieurs jours dans le coma. Sa soudaine disparition a anéanti sa famille. Jean Daniel, 62 ans, son père, explique qu’il l’a trouvé inconscient dans sa chambre à coucher. Alexandre était le bras droit de Jean Daniel qui a des troubles de la vue. « Je suis séparé et Alexandre vivait avec moi. C’est lui qui s’occupait de moi. Aujourd’hui, je me retrouve seul. Alexandre laisse un grand vide. Le sevrage est compliqué quand on prend de la drogue synthétique. Bann zenn bizin pran konsyans ki arive avek sa ladrog la », lance Jean Daniel.
Le corps de Bryan Juste, 19 ans, a été découvert dans les toilettes de l’ancien bureau de la sécurité sociale à Bambous, le 2 juillet. Ce jeune homme est mort des suites d’un œdème pulmonaire après une overdose. Cet ancien boxeur était promis à un brillant avenir. Mais il est tombé dans le piège de la drogue synthétique comme beaucoup d’autres jeunes. Une autre famille est affligée par la perte de l’un de ses membres.
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Questions à… Dr Siddick Maudarbocus: « Les effets sont violents dépendant de la dose »

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"23391","attributes":{"class":"media-image size-full wp-image-37259","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"400","height":"480","alt":"Dr Siddick Maudarbocus"}}]] Dr Siddick Maudarbocus

Le Dr Siddick Maudarbocus est médecin généraliste et spécialisé dans le traitement des dépendances dans une clinique privée. Il dresse un tableau de la situation par rapport aux drogues de synthèse. Les drogues de synthèse sont en vogue. Comment se comparent-elles avec d’autres drogues ? Les drogues de synthèse regroupent des molécules non identifiées qui sont mélangées avec d’autres. On les asperge par la suite sur les herbes de cuisine ou du thé pour les fumer ou pour les aspirer, afin d’éprouver des sensations fortes. Cela procure un sentiment de bien-être éphémère. C’est une automédication très dangereuse qui a des effets secondaires qui peuvent abîmer le cerveau ainsi que les organes vitaux (cœur, reins, foie) et même provoquer la mort. Contrairement aux autres drogues, il est difficile de définir la composition du produit. Ses effets dépendent du dosage du mélange effectué et la capacité de résistance du métabolisme de chaque individu. C’est pour cela que les réactions neurologiques diffèrent d’un usager à l’autre et sont peu communes. Après analyse, on trouve des produits illicites dans le sang des usagers. Les effets des drogues de synthèse sont-ils plus virulents que d’autres ? Les effets sont violents, selon la dose et le consommateur. C’est comme n’importe quel médicament qu’on prendrait à la pharmacie. Si on ne respecte pas la dose prescrite, on peut avoir des problèmes. Y a-t-il un remède pour soigner ceux qui prennent ce type de drogues ? Il y a des remèdes pour soigner le cerveau et rétablir l’équilibre afin que la personne puisse se calmer et sortir graduellement de son état de dépendance. Cela prend entre sept et quatorze jours pour que la drogue soit éliminée par l’organisme, mais il est plus difficile de lui ôter l’envie de recommencer. Il faut pour cela un suivi approprié, afin qu’il ne rechute pas. Quelles sont les conséquences que peuvent avoir les drogues sur les jeunes consommateurs ? Le cerveau des jeunes est plus vulnérable à ces substances. Il peut subir un débalancement psychologique plus conséquent qu’un adulte qui, avec la maturité, peut gérer son état. Il peut avoir des accès de colère ou des réactions imprévisibles. S’il ne stoppe pas sa consommation de drogue, les fonctions neurotransmetteurs, etc. vont être abîmées. Parmi les traitements qu’on peut lui proposer, il y a des médicaments pour calmer son état psychologique, pour rééquilibrer les neurotransmetteurs et nettoyer son corps de tous les produits nocifs. Quels sont les premiers gestes pour porter secours à un adolescent sous l’influence d’une drogue de synthèse ? Une aide médicale est importante, afin d’identifier les produits qu’il a consommés. Un traitement est utile pour éviter une crise d’épilepsie ou pire, un arrêt cardiaque. Pour éviter ce genre de situations, les parents doivent être bien attentifs et savoir reconnaître les signes qui indiquent que leur enfant prend des drogues. La nervosité, le mensonge, le changement de comportement, l’isolement, la perte d’appétit et des amis suspects en sont quelques-uns. Il faut lui proposer un encadrement psychologique, ne pas le laisser dans son coin et le soutenir. Il ne faut pas considérer sa situation comme un fardeau, mais lui témoigner de l’amour. Il aura ainsi plus de chance de remonter la pente. Comment les parents peuvent-ils intervenir, afin que leur enfant ne succombe pas à la tentation ? à travers le dialogue au quotidien, afin que le jeune ait le sens de la famille et de profondes racines. Comment évaluez-vous la situation actuelle concernant les drogues de synthèse ? Elle est inquiétante et cela augmente de jour en jour. Mais des actions et un encadrement peuvent aider à limiter cela.  
 

Drogue dans les collèges: 17 cas rapportés cette année

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"23395","attributes":{"class":"media-image aligncenter size-full wp-image-37260","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"1280","height":"720","alt":"Drogue dans les coll\u00e8ges"}}]] Ram Prakash Ramlugun, Acting Senior Chief Executive du ministère de l’Éducation, a déposé devant la commission d’enquête sur la drogue. Il a indiqué que de janvier à juin 2016, 17 cas de consommation de drogue ont été enregistrés dans neuf collèges. Ram Prakash Ramlugun a communiqué ces chiffres à la commission d’enquête, le lundi 18 juillet, en Cour commerciale. Par ailleurs, de janvier 2014 à décembre 2015, 29 cas ont été recensés dans 15 collèges ainsi que dans un établissement de formation. Ce qui représente un total de 46 cas dans 25 collèges depuis 2014. Les drogues utilisées sont principalement du gandia, de la drogue synthétique et de l’héroïne. Ces cas de drogue dans les collèges, majoritairement ceux des établissements de l’État, ont été rapportés au ministère de l’Éducation. « Nous avons déjà eu des cas concernant de la drogue synthétique et un cas d’héroïne dans un établissement de formation. Nous les avons référés à la police. Nous assumons, par la suite, le suivi psychologique du collégien », a-t-il expliqué à Paul Lam Shang Leen, ancien juge de la Cour suprême, et à ses deux assesseurs Sam Lauthan et Ravind Domun. L’ancien juge lui a alors demandé si les laboratoires des collèges étaient utilisés pour la fabrication de drogues synthétiques. « Aucun cas n’a été rapporté jusqu’ici au ministère », a-t-il répondu. Ravind Domun devait lui donner la réplique en soulignant que les substances présentes dans les laboratoires de chimie sont suffisantes pour que les élèves fabriquent de la drogue de synthèse. L’Acting Senior Chief Executive a affirmé que le ministère veillera à ce que la sécurité soit renforcée à ce niveau-là dans les collèges. La commission a voulu savoir si la situation de la drogue dans les collèges était alarmante. Le haut cadre du ministère a répondu : « For us, one is too many. »
 

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