Economie

Démarrage des consultations budgétaires: les 6 grandes priorités du Budget 2016-2017

Les consultations budgétaires démarrent ce mercredi. En sa capacité de ministre des Finances, sir Anerood Jugnauth aura la lourde tâche de satisfaire les attentes des opérateurs économiques. Il devra, toutefois, faire la part des choses et cerner les grandes priorités. Quelles devraient être  les principaux axes du Budget 2016-2017 ? Parole aux économistes.

Booster la croissance économique

Faire grimper le taux de croissance sera la priorité des priorités du chef du gouvernement. D’autant plus que ces trois dernières années, la croissance n’a même pas franchi la barre des 3,5 %. Le taux s’élevait, en effet, à  3,2 % en 2013,  3,4 % en 2014 et  3,1 % en 2015. Statistics Mauritius table, toutefois, sur une  croissance de 3,9 % cette année. « La croissance qui ne veut toujours pas démarrer est un des gros soucis sur le plan économique. Le gouvernement devrait prendre les mesures nécessaires pour booster la croissance », avance l’observateur économique, Rajiv Servansingh. Vishal Ragoobur, Senior Economist, abonde dans le même sens. « Il faut relancer la croissance et viser un taux variant entre 4 % et 5 % », souligne-t-il.

Calendrier des rencontres

  • Mercredi 13 avril: sir Anerood Jugnauth rencontrera le matin les représentants des PME, des planteurs et des sociétés coopératives. Il aura une rencontre avec les syndicalistes dans l’après-midi.
  • Mercredi 20 avril: les ONG et les associations des droits des consommateurs rencontreront SAJ le matin. Dans l’après-midi, ce sont les porte-parole du secteur privé qui feront connaître leurs propositions budgétaires au chef du gouvernement.

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Comment y parvenir ? Pour Vishal Ragoobur, il n’y a pas trente-six solutions : il faut favoriser l’investissement. « Il faudra pour cela améliorer l’environnement des affaires pour inciter les opérateurs du privé à investir », fait-il ressortir. « Tous les économistes sont d’accord pour dire qu’il nous faudra une croissance de 5 % à 5,5 % pour résorber le chômage. Ce taux de croissance ne peut évidemment être atteint sans des investissements importants par les services publics et le secteur privé », renchérit Rajiv Servansingh. Il faut, poursuit-il, promouvoir l’investissement en simplifiant les procédures administratives et bureaucratiques afin de permettre l’exécution rapide des projets de développement du secteur privé. « Il faudra aussi que le gouvernement mette en place un programme d’investissement réaliste dans le développement des infrastructures publiques », soutient notre interlocuteur. Mettre de l’ordre dans les dépenses publiques tout en rationalisant le fonctionnement des corps paraétatiques est, selon Rajiv Servansingh, un autre moyen pour le gouvernement de relancer la croissance. « Il faudrait aussi un effort focalisé sur les exportations des biens et services mauriciens auxquelles est tributaire la croissance économique », ajoute-t-il.

Créer de l’emploi surtout pour les jeunes

Il y a une impérieuse nécessité de créer des emplois permanents. Tel est l’avis de l’économiste Pierre Dinan. Surtout que le taux de chômage, qui  est passé de 7,8 % en 2014 à 7,9 % en 2015, demeure élevé, notamment chez les jeunes. Le pays comptait, d’ailleurs, 46 600 chômeurs au quatrième trimestre de 2015. 47 % d’entre eux, soit 22 100 sans-emploi, sont âgés de moins de 25 ans. « Il faudra prendre des mesures pour renverser la vapeur, d’autant plus que ces dernières années, il n’y a pas eu de grande amélioration au niveau du chômage. Cette situation, d’ordre structurel, risque de perdurer pendant encore plusieurs années si aucune décision n’est prise », prévient Vishal Ragoobur.

Miser sur les secteurs émergents

Le Budget 2016-2017 devra insuffler un nouveau souffle à l’économie, notamment en mettant l’accent sur le développement des secteurs émergents. « Plusieurs industries nouvelles ont été annoncées. Il faudra avancer rapidement avec ces secteurs émergents, notamment l’économie bleue », recommande Vishal Ragoobur. Il faudrait, parallèlement, poursuit notre interlocuteur, développer davantage les secteurs traditionnels en augmentant leur productivité et leur compétitivité tout en diversifiant leurs marchés. « Dans le Budget, le gouvernement devra faire provision pour accorder plus de moyens pour la promotion de nos produits et services à l’étranger », préconise notre interlocuteur.

Concrétiser rapidement les projets infrastructurels

Vishal Ragoobur est catégorique. Le Budget 2016-2017 devra donner « un coup de pouce » pour concrétiser rapidement les développements infrastructurels qui ont été annoncés au niveau du port, des routes, de l’énergie, entre autres.

Réformer le secteur public

Il faudra apporter des réformes dans le secteur public et les corps paraétatiques en vue de les rendre plus efficients et productifs. Le Budget 2016-2017 devra, avance Vishal Ragoobur, inclure des mesures qui vont dans cette direction. Pierre Dinan y va également de son commentaire. « Je regrette que nous ayons abandonné le ‘Performance Based Budgeting’ (PBB), qui exigeait de chaque ministère qu’il vienne révéler ses objectifs. J’aurais souhaité que le PPB soit réinstauré, car il n’est un secret pour personne que la productivité n’est, dans l’ensemble, pas présente dans la Fonction publique », recommande-t-il. Il est souhaitable, poursuit Pierre Dinan, que le Budget annonce si les recommandations du Code de la bonne gouvernance dans les entreprises seront mises en œuvre et à partir de quand. « Personne ne souhaite privatiser l’eau de la CWA, car c’est un bien public. Par contre, pour avoir une gouvernance améliorée, il faudrait privatiser le management de la CWA », souligne Pierre Dinan.

Combattre la pauvreté et réduire l’inégalité sociale

33 600 familles vivent dans la pauvreté sur un nombre d’environ 335 000 ménages, selon les chiffres dévoilés par SAJ au Parlement récemment. D’où la nécessité de combattre la pauvreté et réduire l’écart entre les riches et les pauvres, recommande Vishal Ragoobur. Il faudra, insiste-t-il, que le gouvernement se donne les moyens dans le Budget pour la mise en œuvre du Marshall Plan sur la pauvreté. « Il faudra également un système d’État-providence qui soit davantage tourné vers ceux qui méritent vraiment d’être aidés. Cela dans le but de réduire et de lutter contre des inégalités qui se manifestent dans le pays », préconise, pour sa part, Pierre Dinan.  
   

Pierre Dinan: «Le Budget devra définir la stratégie du GM concernant la démographie»

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"14827","attributes":{"class":"media-image aligncenter size-full wp-image-24834","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"1280","height":"720","alt":"Pierre Dinan"}}]] « Il faudra que le Budget 2016-2017 dévoile la stratégie du gouvernement concernant la démographie. Nous sommes dans une situation où nous avons de moins en moins de naissance (Ndlr : Ils sont au nombre de 12 738 bébés à avoir poussé leur premier cri en 2015 contre 13 415 naissances en 2014). Ce qui va affecter la population active de ce pays. Il nous manquera des bras et des intelligences », prévient Pierre Dinan.  Dans le même temps, poursuit-il, le pays a de plus en plus de personnes âgées qui, « d’un point de vue économique, représente une charge pour la société ». « La démographie est un vrai problème qui nous guette. Il est plus que temps que le gouvernement vienne enlever la restriction à trois enfants pour les abattements fiscaux. Par ailleurs, c’est vraiment le moment d’adopter dans la législation du travail des dispositions sur le flexi-time et les crèches dans les entreprises. Ce qui donnera plus de flexibilité aux mamans qui travaillent », recommande l’économiste. [row custom_class=""][/row]  
   

Les attentes des opérateurs

Les représentants des Petites et moyennes entreprises et des planteurs rencontreront le chef du gouvernement ce mercredi pour lui faire part de leurs attentes pour le Budget. Voici, dans les grandes lignes, leurs propositions.

Amar Deerpalsing: «Nous demanderons la mise en œuvre des mesures déjà annoncées»

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Amar Deerpalsing, président de la Fédération des PME, demandera à SAJ ce mercredi une accélération au niveau de la mise en place des mesures déjà annoncées dans le dernier Budget. Quelles sont ces mesures ? Le décaissement des Rs 10 milliards pour les PME, la création de plusieurs zones industrielles, entre autres. « Nous préconiserons également des mesures pour que les PME opèrent dans les meilleures conditions. Un des moyens d’y parvenir, c’est d’avoir accès au financement. C’est un problème qui reste entier et la situation devient plus difficile avec le temps », avance Amar Deerpalsing. Le porte-parole des PME souhaite également des aides financières non bancaires comme le leasing, le factory, le equity financing, entre autres. Les entrepreneurs souhaitent également des facilités pour exposer leurs produits dans les grandes surfaces. Or, actuellement, une PME est tenu de payer des  frais de dossier jusqu’à Rs 5 000, sans qu’elle ait la garantie que ses produits seront sur les rayons. Une PME est également tenue de payer des espaces de rayon pour vendre ses produits dans les grandes surfaces. « Il faudrait des facilités à ce niveau », recommande Amar Deerpalsing. Les PME souhaitent également que toutes les institutions dédiées aux PME soient rationalisées en une seule entité. « Ces institutions sont aujourd’hui obsolètes et n’ont pas de raison d’être, car elles ne répondent pas aux attentes des PME », fait ressortir Amar Deerpalsing.

Kreepalloo Sunghoon: «Nous évoquerons les contraintes des planteurs»

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Faire face aux aléas climatiques, palier le manque de main-d’œuvre, trouver des solutions au  problème de terrain, assurer la sécurité alimentaire… ce sont-là autant de défis auxquels sont confrontés les planteurs du pays. « Nous évoquerons ces contraintes et ces difficultés avec le Premier ministre ce mercredi », indique Kreepalloo Sunghoon, président de la Small Planters Association. Les planteurs en profiteront aussi pour livrer leurs attentes. Parmi, il y a la demande pour que le gouvernement mette en place une « land bank » qui permettra aux planteurs d’avoir accès aux terres abandonnées pour leur production agricole. Autre proposition : que les autorités mettent à la disponibilité des planteurs des machines, équipements et autres outils pour qu’ils se lancent dans la culture protégée. Les planteurs souhaitent également la mise en place d’une assurance qui couvrirait les pertes encourues en période de mauvais temps. « Nous demanderons aussi quand le National Wholesale Market verra le jour. Ce projet avait été annoncé dans le dernier Budget et des fonds de Rs 300 millions ont été alloués pour sa réalisation, mais rien n’a été concrétisé à ce stade », conclut Kreepalloo Sunghoon.
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